Être entrepreneur n’est pas un morceau facile. C’est un chemin parsemé de plusieurs difficultés, parfois embarrassantes. Pour cette publication particulièrement, nous allons nous pencher sur les défis posés par les paiements qui arrivent bien au-delà des délais prévus et qui mettent à mal les finances des entrepreneurs. 

Les entreprises dont il est question ici sont celles qui vendent leurs produits ou services et attendent un paiement ultérieur de la part du client. Souvent, l’échéance de paiement se situe entre 15 à 30 jours. En majorité, les clients qui tombent dans cette catégorie sont les grandes organisations, institutions et représentations, ainsi que les sous-projets qu’elles financent.

Sauf qu’il se fait que dans la pratique, il arrive des situations, parfois récurrentes, où les paiements n’arrivent pas tels que prévus. Dans la plupart des cas, l’entrepreneur aura préfinancé l’exécution des travaux ou du service sollicité.

Dans l’idéal, l’entrepreneur peut solliciter une avance de la part du client. Mais en général, c’est une réponse négative qu’il recevra, soit parce que les procédures du client ne le permettent pour un certain type de produit/service ; ou alors, la concurrence est tellement grande que l’entrepreneur craint de perdre un marché s’il donne l’impression d’être trop exigeant ou alors il ne veut pas donner l’impression d’avoir des ressources limitées.

Lorsqu’un paiement tarde à venir, ou ne vient pas à échéance, cela entraîne presque toujours des inconvénients pour la trésorerie. Cette difficulté devient encore plus dérangeante quand on sait que la situation ne va pas se corriger rapidement. 

La raison en est que chez la plupart des clients, les paiements se font par cycle. Par conséquent, lorsqu’un paiement n’est pas arrivé, il faudra attendre un nouveau cycle, qui peut prendre encore 15 à 30 jours, pour espérer le recevoir.

Soucis en amont, pressions en aval

L’entrepreneur se retrouve alors dans une situation où il est comme pris en étau, entre le marteau et l’enclume. Le plus souvent, il a dû engager à son tour des prestataires pour assurer le service au client. Quand une facture n’est pas payée, l’entrepreneur se bat en amont avec un « système » ; et en même temps, il est exposé aux pressions des prestataires qui veulent être désintéressés. 

Cette situation est très difficile à tenir. L’entrepreneur se retrouve impuissant devant le « système », car c’est un ensemble de procédures du client sur lequel il ne peut presque rien faire ; il reçoit alors des réponses du genre : « c’est le système qui exige qu’on puisse faire ceci ou cela » ; mais de l’autre côté, lui en tant qu’individu fait souvent face à des prestataires qu’il connait personnellement, et donc leur devoir pendant longtemps est tout simplement gênant et inconfortable.

Sans compter qu’en dehors des prestataires, l’entrepreneur a lui-même des charges en interne qui doivent être couvertes : des charges fixes et variables. Et le temps qui passe avec les non-paiements ne fera qu’aggraver la situation. De sorte que même lorsqu’il finit par être payé, le cumul de charges sur plus d’un mois amoindrit l’impact du paiement reçu.

Par moments, il est compréhensible de voir autant d’entrepreneurs qui mettent la clé sous la porte. Et aussi, ce n’est pas étonnant de voir plusieurs entrepreneurs vouloir concourir pour des postes électifs en politique ; car peut-être se disent-ils que là, les choses seraient plus faciles, si l’on s’en tient aux supposés émoluments faramineux qui seraient versés aux officiels. C’est fort dommage parce que c’est tout un état d’esprit entrepreneurial qu’on assoupit. 

Mentalité de solutionneur 

Un entrepreneur n’est pas un plaintif, c’est un solutionneur. C’est même cette “solution mindset” qui l’a mené à se lancer dans les affaires. Lorsque donc se posent ce genre d’inconvénients à répétition, il doit trouver des palliatifs pour ne pas continuer à dépendre directement d’une échéance de paiement.

Pour cela, il doit activer le mode « créatif » pour contourner cette difficulté. Il ne s’agit pas de ne pas attendre de paiements du tout ; sinon l’entreprise tombera en faillite. Il s’agit par contre de mettre en place un « système » qui permettra à l’entreprise de résister aux chocs et soubresauts causés par les retards de paiements.

Nous présentons, ci-dessous, quelques solutions que l’entrepreneur pourrait mettre en place pour faire face aux perturbations occasionnées par les non-paiements et les paiements tardifs :

  • En interne : 
  • Fixer un ratio à épargner sur les recettes de chaque prestation. Le pourcentage à fixer est à la seule discrétion de l’entrepreneur ; mais l’important n’est pas le montant, mais la constance appliquée dans cette mesure.

Ainsi, lorsque la trésorerie sera dérangée de suite de non-paiements ou paiements tardifs, l’entrepreneur pourra se servir de sa caisse de secours pour répondre aux besoins pressants.

Toutefois, il faudra veiller à « boucher » là où la ponction a été opérée, au premier prochain paiement et dans la limite du disponible, sans déroger au prélèvement à opérer sur ce dernier paiement lui-même.

Comme on peut le constater, cette solution qui semble facile exige en réalité beaucoup de discipline.

Pour y arriver, vous pouvez vous donner une limite mentale de vous-même vis-à-vis de ce « fond de réserve ». Si vous voulez, vous pouvez décider de le regarder de la même façon que vous regardez l’impôt dû à l’Etat, ou pour les croyants, la manière dont vous considérez la dîme. Dans les deux cas, même si vous avez cet argent entre vos mains (dîme ou impôt, TVA), vous savez bien qu’il ne vous appartient pas ; vous veillerez donc à le remettre à qui de droit.

  • Eviter les dépenses imprévues : sur ce point, on ne soulignera jamais assez l’importance d’avoir un budget, c.-à-d. une prévision des recettes et les allocations y relatives sur une période donnée. Ceci vous permettra de ne pas céder devant la pulsion du moment. Une dépense peut être pressante, mais est-elle importante ?

Une gestion prudentielle de vos ressources vous aidera à tenir plus longtemps, surtout si vous fonctionnez avec un système de « bons de commande » et non de « contrats », où au moins vous êtes sûr de la régularité des entrées financières.

  • Diversifier et multiplier l’offre : la meilleure défense, c’est l’attaque, dit-on. Lorsqu’il y a danger à la trésorerie, il ne suffit pas de protéger ce que l’on a ; il est aussi bon de chercher à renflouer la caisse autrement que par les ventes habituelles. Ceci exige de vous d’être innovant pour arriver à proposer des produits/services nouveaux ou dérivés.  
  • Vis-à-vis des clients :
  • Faire le suivi des factures avant le délai prévu pour le paiement : il ne faut pas attendre l’arrivée de l’échéance pour vérifier si votre paiement a été initié. Cela ne coûte rien de contacter le client pour demander le statut de votre facture. C’est vrai que, vis-à-vis du client, vous ne voulez pas donner l’impression d’être impatient ou agité ; mais, mettez ce sentiment de côté, c’est une gêne inutile. 

Il est arrivé qu’une facture est sortie du processus, mais le client ne s’en est peut-être pas rendu compte. Ce petit rappel sera utile, au lieu d’attendre la fin de l’échéance prévue pour le paiement, et constater que ce dernier n’est pas arrivé. Et lorsqu’à ce moment-là le client se rend compte de l’erreur ou omission, le temps sera déjà écoulé ; or, vous aviez la possibilité de corriger cela bien avant.

  • Si possible, solliciter le paiement d’une avance sur la prestation : il est vrai que ceci n’est pas facile à obtenir de la part des anciens clients. Lorsque vous essayez, ils vont vous citer les « procédures » qui ne le permettent pas pour votre cas ou votre type de produit/service. Mais ceci n’est pas inscrit dans du marbre ; il faut toujours essayer.

Si ceci est parfois difficile à obtenir avec les anciens clients, vous pouvez y arriver avec les nouveaux clients, surtout lorsque ceux-ci vous ont été recommandés, et donc ils ont déjà une bonne image de votre entreprise. Vous pouvez donc utiliser cet avantage dont vous disposez vis-à-vis d’eux pour poser vos conditions. Dites-leur seulement que ce sont vos « procédures » qui exigent cela, ils comprendront.

Que ce soit avec les anciens comme les nouveaux clients, cette stratégie ne réussira pas certes pour tous, mais au moins, vous pouvez réussir auprès de certains, et ça sera déjà quelque chose.

  • Pression légale et/ou associative/corporative : il existe des cas où des experts juristes ou autres peuvent vous venir en aide, en mettant la pression sur votre client afin d’obtenir le paiement dû. Il y a aussi parfois des corporations qui constituent un renfort de taille, surtout lorsque vous faites face à de gros clients, devant qui vous seul ne faites pas le poids. Souvent, les grandes organisations sont mal à l’aise lorsque leur nom commence à être cité dans des cas comme ceux-là ; et ils s’arrangeront vite pour régler et préserver leur image ou notoriété publique. 

Bien sûr, cette dernière démarche est à utiliser uniquement dans les cas extrêmes.

Vous aussi, avez-vous été confrontés à des problèmes de non-paiements qui ont dérangé votre trésorerie ?

Quelles sont les solutions que vous avez adoptées pour traverser la situation ? Voulez-vous les partager avec nous ? 

Joyeuse saison pascale !

Daniel K. Kalonji